PERSPECTIVES. Le match qui a opposé Donald Trump à Kamala Harris pour la Maison Blanche s’est traduit par des discours parfois violents durant la campagne. L’affrontement s’est aussi joué sur le terrain des produits dérivés, orchestré par les équipes des deux candidat·es qui ont redoublé d’inventivité durant plusieurs mois.
Casquettes, tee-shirts, mugs, porte-clés, figurines, pins et même montres de luxe, tout est permis pour afficher les slogans et autres déclarations chocs des candidat·es. Depuis le 19ème siècle, les « goodies » font partie intégrante des campagnes présidentielles aux États-Unis. En 2024, ils sont partout, dans les meetings et sur les réseaux sociaux.
Ce phénomène, moins présent en France, s’explique par une polarisation beaucoup plus importante du scrutin qui se joue entre deux camps. Robin Morvan, président de goodact.fr, site de goodies éco-responsables et interviewé par le média Slate, met aussi en avant la « culture consumériste des américains qui ont beaucoup moins de pudeur à afficher leur soutien pour tel ou tel candidat ».
Une manne financière non négligeable
Les deux candidat·es ont pu bénéficier d’un budget pharaonique grâce à leur parti ou encore avec les dons de milliardaires ayant revendiqué publiquement leur soutien. Mais le marché du produit dérivé permet également de rapporter des centaines de milliers de dollars pour financer ces campagnes extrêmement coûteuses. En effet, la campagne de 2024 a été la plus chère de toute l’histoire politique américaine. Presque 1,4 milliard de dollars ont été mis à disposition de Donald Trump et Kamala Harris, bien loin des quelques millions d’euros rassemblés par les candidat·es en France en 2022.
Produire des « goodies » en grande quantité permet de réduire par la même occasion le budget alloué à des spots de publicité plus conventionnels. Les partisan·es deviennent des sortes de « panneaux publicitaires ambulants » pour leurs campagnes, note Peter Loge, de l’université George Washington.
Un outil d’adhésion redoutable
Qu’il s’agisse de se mettre en avant ou de décrédibiliser son adversaire, les goodies permettent aux candidat·es de renforcer leur discours de campagnes. Ils assurent une fidélisation de leur base électorale autour de séquences et punchlines devenues virales, et de toucher des électeur·ices plus indécis·es.
Les élections américaines sont en effet marquées par un esprit festif et compétitif, où les rassemblements politiques ressemblent presque à des événements sportifs ou culturels. Les « goodies » deviennent des souvenirs de participation à ces grands événements, renforçant la sensation d’être acteur·ice du processus démocratique. Ils font également perdurer la campagne dans le temps puisque l’adhésion au ou à la candidat·e demeure, qu’iel gagne ou qu’iel perde.
Les produits commercialisés permettent aussi de tourner en dérision le ou la candidat.e adverse. Les Démocrates ont choisi de commercialiser des accessoires avec la photo judiciaire de Donald Trump tandis que les Républicains vendaient entre autres des vêtements pour bébé portant l’inscription « Joe Biden makes me cry » (« Joe Biden me fait pleurer », en français).
Une stratégie gagnante pour Donald Trump
Candidat pour la 3ème fois à la Présidence, l’homme d’affaire n’en est pas à son coup d’essai. La célèbre casquette rouge MAGA (« Make America Great Again » , « Redonner sa grandeur à l’Amérique ») de 2016 à laissé place à une nouvelle version blanche et dorée. Parmi l’ensemble des goodies commercialisés à son image comme des bibles, des baskets ou encore des bouts de costumes, deux sortent particulièrement du lot.
Une montre en or constituée d’un bracelet de 200 g d’or massif 18 carats et serti de 122 diamants a été vendue en 147 exemplaires pour la modique somme de 100 000 dollars. Accompagnée par une lettre personnalisée rédigée par le 45e et maintenant 47e président des Etats-Unis, tout est bon pour séduire les plus fervent·es supporters du camp républicain.
Mais l’objet phare de sa campagne est beaucoup moins clinquant : un tee-shirt le représentant ensanglanté après sa tentative d’assassinat. C’est sans doute l’une des images les plus marquantes de ces élections et qui a été utilisée massivement par ses électeur·ices pour mettre en avant son courage et sa détermination. En juillet dernier, c’était « le seul tee-shirt que je vends en ce moment » déclarait Léandre, vendeur de produits dérivés, au micro de FranceInfo.
Kamala Harris est partie elle avec quelques longueurs de retard, même si le slogan « Yes she can » (Oui elle peut), référence au slogan « Yes we can » de Barack Obama, s’est retrouvé sur de nombreux tee-shirts et casquettes.
La stratégie de communication du camp démocrate a été beaucoup moins impactante que celle des Républicains qui ont parfaitement su capitaliser sur l’image du nouveau président des États-Unis. Si savoir se raconter est l’un des principaux facteurs dans la course vers la Maison Blanche, Donald Trump apparaît alors comme le grand vainqueur de cette édition 2024.
Marius Noël
© Cassidy Araiza

About the Author
Marius Noël
Après un double cursus en Histoire-Sciences Politiques à l’Institut Catholique de Paris, je suis actuellement étudiant en Master Journalisme à l’École de Journalisme de Sciences Po Paris.