Vêtements ordinaires, les dessous font partie intégrante du quotidien des femmes… mais aussi de leur histoire. La petite culotte n’est pas exemptée des changements qui ont parcouru les époques, reflet des mœurs et des sociétés. Et dans le récit de la mode, libérer les corps passe aussi par les sous-vêtements.
Strings, tangas, shorty, taille haute ou taille basse… Aujourd’hui, quand il s’agit de dessous, les femmes ont le choix. Mais cela n’a pas toujours été le cas. En effet, le sous-vêtement féminin a connu énormément de transformations. Outil de contrôle des corps ou symbole de libération, son histoire est intimement liée à celle des femmes et des luttes pour leur émancipation. Les origines du sous-vêtement remontent à la Préhistoire. À l’époque, tout le monde porte le pagne, des bandes de tissu passant sous les jambes et se nouant autour de la taille, sans distinction de genre. Cette forme a évolué au fil des décennies selon les cultures jusqu’à devenir la petite culotte que l’on connaît aujourd’hui.
Cinquante nuances de corsets
C’est à la Renaissance qu’apparaît le corps piqué. Il évoluera en corps à baleine dans la deuxième moitié du 16e siècle puis en corset au 19e. De plus en plus complexe, de plus en plus contraignant, il sera le véritable tyran de la ligne féminine jusqu’à atteindre son paroxysme à la Belle Époque où il remonte la poitrine et descend jusqu’à mi-cuisse pour créer la silhouette en S.

Une autre invention marquera la fin du 15e siècle : la jupe à cerceau espagnole appelée vertugadin en France. Son but ? Élargir les hanches des femmes pour accentuer visuellement leur capacité à porter des enfants. Lui-même subira plusieurs modifications tout au long de l’histoire se transformant en panier puis en crinoline au 19e siècle.
Peu importe l’époque ou le nom, ces deux systèmes de contrainte sont des alliés véritables. Leur objectif est toujours le même : créer un contraste entre taille fine et hanches larges. Il y aura quand même des petites variations. Par exemple, le corps piqué du 16e siècle sera renforcé par des plaques devant pour écraser la poitrine. Avec la révolution industrielle, deux changements auront leur importance : les baleines sont maintenant faites de métal et le corset, jusque-là très sobre, devient un élément de coquetterie et de parure.

Malgré les nombreuses alertes du corps médical sur les dangers (souvent fantasmés) du corset, il faudra attendre que l’industrie de la mode elle-même s’en mêle pour l’envoyer aux oubliettes. Cela se fera sous l’impulsion de la haute couture qui va bouleverser la silhouette féminine au début du 20e siècle.
Libérées, délivrées ?
Les femmes se sont « libérées » du corset pendant un petit bout d’histoire juste après la révolution française. Bref moment de répit, la mode directoire, inspirée de l’antiquité, n’impose pas le corset. À l’époque, on porte une brassière corsetée pour remonter les seins. Même si, au final, dans les dix premières années du 19e siècle, le corset à la Ninon, allié au jupon crinoline, descendra sur le ventre pour l’aplatir.
Les années folles marquent le tournant dans l’histoire des sous-vêtements féminins. Pour (presque) la première fois depuis la Renaissance, le corps s’émancipe. Le look à la garçonne prône un allégement de la silhouette avec une ligne droite. Le port du soutien-gorge associé à une gaine est de mise. Attention, il faut savoir qu’il n’y a que les femmes déjà minces qui se débarrassent totalement du corset, les autres en porte un qui ne couvre pas la poitrine. Le corps est tout de même plus libre de ses mouvements pour aller travailler, faire du sport ou encore danser le charleston.

Des codes plus traditionnels font leur retour dans les années 30. À la fin des années 40, les seins en obus font fureur. Les femmes portent alors soutiens-gorges ou guêpières pour permettre cette forme en pointe popularisée par le film The Outlaw (1943). L’actrice principale Jane Russel lance la tendance d’une nouvelle poitrine saillante et assumée. Ce sont, en effet, les stars hollywoodiennes qui font entrer le glamour dans la lingerie. Dans les années 50, le New Look de Dior indique le retour de la taille marquée par un système de corsetage.
Peu à peu, le régime minceur se substitue au corset. Avec les années 80, garder un corps mince et tonique grâce à l’aérobic est primordial. Si la contrainte n’est plus appliquée par le vêtement, elle est toujours présente dans l’imaginaire collectif.
Et la petite culotte ?
C’est un homme qui fut le créateur de la petite culotte comme on la connaît aujourd’hui. Étienne Valton, un jour de 1918, prend le caleçon long masculin, coupe les jambes et décide de le fabriquer avec du coton… la culotte est née. Ce vêtement devient un élément phare de l’entreprise familiale qui sera renommée « Petit Bâteau » deux ans plus tard. Il remporte même le Grand Prix de l’innovation lors de l’Exposition Universelle de 1937.
Elle reste longtemps blanche ou dans des tons pastel, le noir considéré comme trop vulgaire. Il faut attendre les années 60 pour que la petite culotte se stylise. En dentelle, de couleur ou encore en lycra, elle se diversifie. La forme évoluera elle aussi avec la libération sexuelle des années 70 qui amènera notamment le string. Les créateur⋅ices de mode cherchent alors à libérer les corps et briser les tabous autour de la silhouette féminine.
Axelle Dusart
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Axelle Dusart
Rédactrice permanente pour Blazé·e·s Magazine. Étudiante en Master Mode et Communication à l’Université de la Mode de Lyon. Je viens d’une formation en Études Culturelles et Journalisme. J’aime explorer les implications politiques et sociales de la mode dans mes articles.